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Charente (16) Angoulême arrondissement - 268
l'un ou l'autre sexe, qui contribuent à l'œuvre par leurs [les préposées] pourront être stilées à peigner et faire
aumônes; les plus fortunées en donnant 33 livres et 3 les autres opérations faciles et non périlleuses...”
sols, — les moins fortunées, 33 sols et 3 deniers, — et
les autres 33 deniers seulement, en souvenir des 33 ans Les quêtes pour les pauvres se font à l'église, aux deux
messes du dimanche, et aussi à domicile. On accepte
et 3 mois de la vie terrestre du Christ.
les denrées offertes, ainsi que les restes de table qu'on
Le mode d'élection de la supérieure est assez curieux. accommode. Sur ce point, il convient de citer le trait
Le dimanche dans l'octave de l'Ascension, trois sœurs suivant rapporté par la supérieure dans son épître à la
sont choisies parmi les 25 de la ville comme pouvant jeune comtesse de Montbron, Charlotte-Jacqueline Brulard,
être supérieures. Toutes les trois se placent alors en trois trait dont celle-ci ne pouvait qu'être très touchée
lieux déterminés dans la chapelle de l'œuvre; et celle des puisqu'il était tout à la louange de Louis-Henri de Brienne
trois près de laquelle va se ranger le plus grand nombre qu'elle venait d'épouser. Un jour, écrit la supérieure:
de sœurs est élue supérieure. Ou bien il est procédé à “nos sœurs questeuses, qui recueilloient lors par les
l'élection par vote secret. Dans ce cas, on place sur maisons les restes de table pour le secours des Pauvres
l'autel trois boîtes portant chacune le nom d'une de la campagne, prièrent M. le comte de Brienne de leur
candidate, et les 32 sœurs qui participent au vote vont, faire donner les restes de la table de ses domestiques. Il
à lourde rôle, déposer un pois dans la boite de leur leur répondit: que ce serait faire injure à Jésus-Christ,
choix. Celle des trois candidatures qui obtient le plus puisque c'est luy à qui l'on donne à manger, en donnant
de pois est proclamée supérieure. Ajoutons que le curé à manger aux Pauvres pour l'amour de luy, que de luy
de Montbron est, de droit, directeur spirituel de la donner les restes de la table de ses domestiques: qu'il
confrérie. donneroit les prémices de la sienne; que les Pauvres
Pour le bon fonctionnement de l'œuvre, les règlements seroient servis avant luy et qu'il ne mangeroit que leurs
très circonstanciés ne laissent rien au hasard, mais restes. C'est ainsi qu'il en a usé, Madame, pendant son
prévoient tout; coffre à argent, livre des recettes et séjour en cette ville; il a fait donner à nos sœurs
dépenses, garde-meuble (car on prête même du questeuses plusieurs plats de sa table pour le secours
meuble), dettes et procès à éviter, quêtes à faire, des Pauvres infirmes, avant de manger d'aucun; et, en
remèdes à préparer. quittant la ville, il a laissé des ordres pour nous faire
donner la portion de ses revenus qu'il consacre à ce
Chaque dimanche, vers l'heure de midi, les associées du charitable usage.”
1er ordre se réunissent chez la supérieure. Le 1er
dimanche du mois on dresse la liste des sœurs qui Pour être complet, nous ajouterons que la fête principale
doivent faire la quête; le 2e dimanche, les quêteuses de l'œuvre était la fête de Notre-Dame de la Pitié, et que
rendent compte de leurs recettes; le 3e dimanche, on la chapelle fondée sous ce vocable en. L'église de
désigne les personnes à secourir, surtout dans les Montbron, par la famille du Rousseau de Ferrières, était le
villages; le 4e dimanche, on délibère sur les remèdes à siège de la pieuse confrérie.
préparer. Cette œuvre charitable méritait d'être signalée à un
Au sujet des remèdes, voici ce qui est dit à l'article XVII: double point de vue: d'abord parce qu'elle est fort
“Si l'on peut avoir un lieu commode pour mettre et intéressante par elle-même, et ensuite parce qu'elle a été
préparer les remèdes, on commettra deux sœurs pour l'origine de l'hôpital actuel de Montbron, dénommé, au
en avoir soin, pour préparer au moins les plus XVIIe siècle, Hôpital de N.-D. de la Pitié. Cet hôpital
commodes, les distribuer et les donner aux malades, ou commença en effet à fonctionner avec l'aide des
par elles-mêmes, ou par l'entremise des femmes personnes séculières dont nous avons cité plus haut les
Préposées. Elles auront des seringues qu'elles prêteront noms, ainsi que le constate M. l'abbé Nanglard en son
à ces femmes, et elles leur enseigneront la façon de s'en Pouillé (t. II, p. 577); mais, au siècle suivant, il fut confié
servir. Elles feront les décoctions, les tisanes aux Filles de Sainte- Marthe d'Angoulême, qui, aujourd'hui
rafraîchissantes et laxatives, les onguents et ces remèdes encore, en assurent la direction avec leur traditionnel
faciles et utiles qui sont enseignez par tant de livres qui dévouement.
paraissent depuis dix ou vingt ans, et que tant de Bulletins et Mémoires de la Société Archéologique de
personnes mettent en usage très heureusement. ...Elles la Charente, 1931, p. XLV Annexe II, pp. XCIII-CI
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