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Charente (16) Vues anciennes - 199
Le plan de l’église de Cellefrouin se compose d’une nef
tripartite de quatre travées, suivie d’un transept peu
saillant, achevé par un sanctuaire profond, composé
d’une abside précédée d’une travée droite de chœur et
flanquée de deux absidioles ouvrant sur les bras du
transept (fig. 1). Des passages ouverts tardivement font
communiquer les absidioles avec le chœur.
Fermé à l’ouest par une façade écran, animé par de
grandes arcades étroites lui donnant un élan vertical (fig.
2), l’édifice est entièrement voûté en berceau plein
cintre, à l’exception de l’abside et des absidioles, voûtées
en cul-de-four, et de la croisée du transept cou verte
d’une coupole sur trompes. Un clocher carré sur monte
la croisée du transept.
A l’intérieur, le sol a été surhaussé de 1,30 , ce qui
m
Un établissement de chanoines réformés selon la règle
alourdit les proportions de l’élévation d’origine.
de saint Augustin fut fondé par Arnaud de Vitabre,
évêque de Périgueux, avant 1037 (date de la mort Les supports de la nef (fig. 3) sont de puissants piliers
d’Arnaud) (1). carrés cantonnés de demi-colonnes engagées sous les
grandes arcades et de simples pilastres du côté du
Le cartulaire de Cellefrouin montre que les donations
vaisseau central et des collatéraux.
se multiplièrent entre 1060 et 1108 (2). Parmi les
Des pilastres engagés dans les murs latéraux reçoivent
donateurs les plus généreux se trouvaient Pierre Frouin
également les doubleaux des collatéraux. A l’extérieur,
et ses fils, qui donneront leur nom à la nouvelle
des contreforts plats renforcent ces mêmes murs au
fondation (cella fruinus). C’est donc à la fin du XI siècle
e
droit des pilastres. L’importance des supports de la nef
qu’il semble Je plus raisonnable de situer la construction
et le renforcement des murs montrent que l’édifice a
de l’église, ce qui correspond à l’abbatiat d’Adémar III
été construit pour être voûté dès l’origine.
(1060-1100) (3).
Les joints larges des supports intérieurs en grand
Vers 1096-1099, celle-ci fut, avec ses dépendances,
appareil, comme le caractère un peu irrégulier du petit
donnée à Charroux et devint bénédictine (4). En 1102,
appareil des murs latéraux conduisent à dater cette nef
Cellefrouin n’apparaît plus sous la dénomination
simple et austère de la deuxième moitié du XIe siècle.
d’ecclesia mais comme monasterium; mais dès 1109,
l’établissement redevient Augustin, après une dizaine L’examen des maçonneries révèle cependant l’existence
d’années seulement d’obédience bénédictine (5). d’un décrochement dans l’épaisseur du mur de la façade,
des murs latéraux et même du bras sud du transept juste
Au XVI siècle, lors des guerres de religion, le clocher
e
au-dessus du niveau des tailloirs des chapiteaux de la
fut endommagé (6) et son premier étage refait en 1630 nef, décrochement qui dénote une reprise de la
(7). En 1769, l’église fut de nouveau endommagée; lors
construction du mur, dont on a diminué l’épaisseur dans
de sa remise en état, à la fin du XVIII siècle, le sol de
e
les parties hautes. On peut également observer une
la nef fut surhaussé d’environ 1,30 ; à cette occasion
m
rupture de niveau dans les grandes arcades de la dernière
un caveau appelé « crypte » fut découvert sous la croisée travée où, des deux côtés de la nef, les départs d’arcs
du transept (8).
sont plus élevés sur la face orientale des supports que
sur leur face occidentale, comme s’il s’agissait de mieux
En 1865, l’abbatiale fut restaurée dans son ensemble
contrebuter la croisée ou, du moins, de racheter la
sous la conduite d’Edouard Warin et la réception des
travaux effectuée en 1878 (9). Enfin, l’édifice fut classé différence de niveau entre les chapiteaux des piles de la
parmi les Monuments historiques en 1907 (10). croisée du transept et ceux des grandes arcades.
Ce changement de parti en cours de tion est également
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