Page 191 - Canton_Mansle-0-wn
P. 191
Charente (16) Vues anciennes - 191
destruction de la féodalité elle-même. Dans un traité fait A cette question de droit -féodal se rattache celle des
en 1280 les religieux déclarent, en présence du seigneur foires et marchés, qui était aussi en 1280 l’objet d’une
de Cellefrouin, qu’ils tiennent immédiatement de contestation entre l’abbé et Gui de La Rochefoucauld,
l’évêché tout le temporel de leur maison, et d’autre part et qui fut terminée par une transaction aux termes de
ils reconnaissent, l’évêque présent, que la haute justice laquelle ce dernier pouvait faire tenir des marchés tous
appartient au châtelain de l’endroit . La question ainsi les mercredis et des foires quand bon lui semblait sur la
10
résolue se représenta plus tard, soit que la convention place contiguë au mur de clôture de l’abbaye et sur celle
eût été abrogée, soit qu’on l’eût oubliée ou méconnue. qui est devant les portes de l’église, sauf dans la partie
comprise’ entre celles-ci et le ruisseau venant de la
En 1282, Guillaume de La Rochefoucauld, seigneur de
fontaine. Les religieux n’eurent droit aux produits que
Cellefrouin, consentit à ce que diverses personnes
tinssent de l’évêque médiatement ou immédiatement le d’une seule foire, celle de Saint-Biaise; sur laquelle le
seigneur ne se^ réserva que le domaine éminent et la
Breuil de Cobeza et autres choses dans la paroisse de
viguerie .
15
Beaulieu. Les immeubles dont il s’agit appartenaient en
1318 à la famille Beuvi, de laquelle ils passèrent au L’abbaye n’était pas riche. Vers 1725, l’abbé
couvent, et l’abbé en 1361 en rendait aveu à l’évêque ; commendataire en retirait deux mille livres de revenu,
11
mais ses successeurs ayant voulu porter en même temps mais il avait à en payer huit cents pour les décimes et
leur hommage à l’évêché pour le reste du temporel, les trois cents au curé ou vicaire perpétuel, ce qui réduisait
La Rochefoucauld s’y opposèrent. En 1400 Guy de La sa part à moins de cent Pistoles, “en y comprenant
Rochefoucauld reconnut de nouveau que tout ce que toutes les places monacales, dont il jouissait, n’y ayant,
possédait le monastère relevait de l’évêque, dont il tenait nous dit un contemporain, qu’un chambrier, qui avait
lui-même le château et la châtellenie de Cellefrouin. sept cents livres de rente.”
C’est du moins ce que dit Mesneau dans son inventaire
A côté du couvent on était plus pauvre encore et sou
du trésor de l’évêché ; seulement le titre qu’il analyse vent on mourait de faim. Cellefrouin avec trois paroisses
12
ne se retrouve point, et il est possible que cet auteur ait
voisines formait entre le Poitou et l’Angoumois une
pris pour une convention nouvelle un vidimus de celle
enclave de la Saintonge et appartenait à l’élection de
de 1280, délivré à la date qu’il indique. Ce qui le ferait
Saint-Jean-d’Angély. Cette lointaine dépendance était
croire c’est que l’objet du traité est le même et que les sacrifiée dans la répartition des impôts et peut-être dans
trois contractants portent les mêmes noms que dans
celle de la milice. Un relevé fait en 1641 sur les rôles de
l’acte de 1280. Quoi qu’il en soit, en 1462, l’abbé rendit
la grand’taille constate que dans les trois ou quatre
aveu à l’évêque de tout le temporel de l’abbaye sous
années précédentes six soldats de Cellefrouin étaient
l’achaptement d’un denier d’argent valant douze deniers morts au service du roi ; que vingt-cinq familles avaient
de monnaie courante; et pareils hommages furent faits
quitté la paroisse, les unes pour errer et mendier, les
en 1472, 1494, 1503 et 1509; mais en 1565, Louis
autres pour transporter leur domicile dans des élections
Prévost, possesseur par indivis des deux tiers de la
moins chargées ; que plusieurs héritages étaient aban-
baronnie de Cellefrouin, comprend le monastère dans
donnés et les maisons en ruines, et que des biens autre
son dénombrement .
13
fois tenus par des roturiers étaient maintenant exploités
Vers 1720 on se disputait encore, non plus sur la par des nobles et par suite exempts d’impôts, ce qui
mouvance, mais sur la juridiction. L’abbé n’ayant que grevait d’autant les autres; au total, trente-neuf cotes
moyenne et basse justice, le duc de La Rochefoucauld irrécouvrables ou perdues .
16
revendiquait le ressort, dont le sénéchal d’Angoumois,
Le grand hiver de 1709 vint ajouter pour de longues
de son côté, prétendait être en possession . Il est
14
années à la misère habituelle de la population de cette
certain, comme nous venons de le voir, que les La Roche
paroisse et de celles d’alentour. “Les habitants de San-
foucauld jouissaient de la haute justice à Cellefrouin au
sac et de Cellefrouin sont fort pauvres, dit un mémoire
XIIIe siècle et que dès le XIIe un viguier la rendait en
écrit vers 1725. Le pays est ruiné depuis la destruction
leur nom.
des châtaigniers, qui périrent par la gelée de 1709, et
10 Voir appendice, E, p. 9
11 Archives de la Charente, G, Cellefrouin. 15 Archives de la Charente, G, Cellefrouin ; — H, Saint-Amant,
12 Mesneau, Inventaire du trésor de l’évêché, 97. 7. — Voir appendice, E, p. 93.
13 Archives de la Charente, G, Cellefrouin. 16 Archives de la Charente, G, Cellefrouin ; — H, Saint-Amant,
14 J. Vigier, Coutumes d’Angoumois, 2* édition, 531. 7. — Voir appendice, E, p. 93.
© CatillusCarol.Corp