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Charente (16) Angoulême arrondissement - 154
le niveau de ce brevet pour permettre l'accès et l'emprise arrondissement, était au contraire paternel et
de l'enseignement national aux frères de la doctrine bienveillant, et avait pour chacun de nous des paroles
chrétienne, et le placer ainsi sous la domination encourageantes qui poussaient à l'effort.
religieuse à laquelle il fallait des maîtres à sa dévotion.
Quand il inspectait les écoles de notre région, il
De la sorte l'instruction donnée à la masse était descendait à Marcillac, à l'hôtel du Lion d'Or où il
inférieure. Les citoyens étant moins éclairés devenaient séjournait la semaine.
plus faciles à gouverner.
Ce grand hôtel, renommé à la ronde, était tenu par
Lorsque M. l'instituteur Ranger remplaça M. l'affable Mme Cazin à l'étroite coiffe bien blanche
Ganachaud, en 1879, il y avait treize années que les adonisant sa chevelure de neige. La nombreuse clientèle
écoles stagiaires de France n'existaient plus. de Mme Cazin lui était affectueusement attachée, celle-ci
la comblait d'ailleurs d'aménités et de soins constants
Jusqu'à ce jour, par ordre de dates successives, après M.
ainsi que de chatteries culinaires que la tradition a
Ranger et Mme Ganachaud, les directeurs et les
retenues.
directrices des écoles de Marcillac furent Messieurs et
Mesdames Dussutour, Flèche, Brousse et Guillon, M. Les soirs d'été, M. Rousseau allait se promener avec
Bastard et Mme Cloux, M. Petit, Mlle Jacquemin, Mme mon père et je les suivais, fier de me trouver en docte
Bergeron et M. Soulard. compagnie. D'autant plus que la sévérité paternelle que
je supportais difficilement cessait en la présence de M.
Tous furent également de bons et excellents maîtres que
l'Inspecteur, qui me taquinait parfois et m'envoyait lui
j'ai particulièrement connus. Ils furent imbus de la
chercher du tabac à priser. Je l'aimais beaucoup.
grandeur de leur mission spéciale, évitant de heurter par
leurs conceptions personnelles les pères des enfants qui Cette affection a contribué à m'attirer dans
leur étaient confiés, et comprenant que toute critique l'enseignement que je considérais déjà et sans m'en
extérieure sur eux était préjudiciable au développement rendre bien compte comme une espèce de sacerdoce
éducatif des élèves dont ils avaient la responsabilité laïque, quoique la situation pécuniaire des instituteurs,
morale. encore très précaire lors de mon entrée à l'Ecole
normale, ne fût pas des plus engageantes.
Messieurs Masfrand et Roussaud, inspecteurs primaires
du temps de ces écoles stagiaires, étaient de natures En 1842 mon père avait débuté avec un traitement
différentes. Ils tinrent souvent leurs conférences annuel de 200 francs. Il fallut presque vingt ans pour
pédagogiques à Marcillac, qui fut aussi plus tard centre voir éclore des temps moins durs.
d'examen sous la présidence du conseiller général, M.
Ce traitement de misère, nullement en rapport avec
Louis Plantevigne, maire, ancien polytechnicien, lorsque,
l'instruction exigée par la loi Guizot de 1833, avait
avant l'institution du certificat d'études primaires découragé beaucoup de normaliens qui se tracèrent par
élémentaires, M. l'inspecteur d'Académie Aulard
ailleurs une voie plus rémunératrice.
organisa des concours entre les meilleurs élèves des
Dans la suite j'ai fait certaines remarques. Et si de la
écoles communales, avec le classement cantonal par
ordre de mérite. promotion de mon père j'en ai suivi qui, comme lui, ont
persévéré dans la carrière, j'en ai connu plusieurs qui
Le souvenir que j'ai gardé de ces deux inspecteurs de
l'ont désertée et qui sont devenus en Charente, l'un
l'enseignement primaire m'est souvent revenu à la
vétérinaire et les autres huissier, marchand de biens, juge
pensée.
de paix, agent-voyer, banquier, etc. Le plus favorisé,
Le premier, M. Masfrand, froid, distant et autoritaire, maire, conseiller général, père d'un sculpteur de talent,
était l'effroi des écoliers et quelque peu de leurs maîtres. avait acquis une fortune atteignant le million.
Tous ressentaient un certain frisson quand, ouvrant la
Le Château
porte de l'école, il y pénétrait et s'avançait vers eux avec
son légendaire pantalon blanc. Marcillac-Lanville fut, il y a onze siècles, le siège d'une
principauté renommée. Cette importante seigneurie
L'autre, M. Roussaud, qui fut l'objet d'une citation lors
passa de la maison de Saint-Maur (d'autres disent
d'un incendie, à Nanclars, commune du canton de
Sainte-Maure) à celle de Craon, puis à celle de La
St-Amant-de-Boixe où il fut instituteur avant d'être
Rochefoucauld, dont un descendant, le duc Guy VIII,
appelé à Angoulême, puis à l'Inspection primaire de cet
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