Page 184 - Canton_Mansle-0-wn
P. 184

Charente (16) Vues anciennes - 184

                                               Misère des Habitants de Cellefrouin

                                                           au XVIII  siècle
                                                                     e
                                               Gervais, Mémoires sur l'Angoumois.

                                        (Communiqué par M. Château, instituteur, à Aunac)



        Les habitants de Cellefrouin sont fort pauvres, dit un
        mémoire écrit vers 1725. Le pays est ruiné depuis la
        destruction des châtaigniers, qui périrent par la gelée de
        1709, et qu’on doit s’attendre à voir remplacés que dans
        un temps fort éloigné. Le terrain, est communément si
        froid et si aride dans les lieux où ces arbres croissaient
        qu’on n'a pu y faire rien venir depuis, ce qui est cause
        qu’une partie du pays est inculte. La plupart des maisons
        du bourg tombent en ruines.

        Vers 1775 une ressource s’offrit aux paysans, mais ils
        ne acceptèrent que bien lentement. Un sieur Sardain de
        l’Augerie,  qui  possédait  plusieurs  domaines  dans  la
        paroisse, prit à faire semer dans chacune de ses fermes
        la huitième partie d’un journal en pommes de terre. Il
        en laissa tout le produit à ses colons, soit qu’il estima
        qu’il ne valait pas la peine d’en prendre sa part, soit
        plutôt qu’il voulut encourager cette nouvelle culture.

        Elle s'étendit, en effet; mais alors l’abbé en réclama la
        dîme.  Les  habitants  refusèrent;  de  là  un  procès  qui,
        engagé en 1783, durait encore en 1786. Un mémoire en
        faveur des cultivateurs nous apprend en quelle pauvre
        estime on tenait alors ce précieux tubercule:

           “La pomme de terre pourrait, y est-il dit, dans le cas
           de dernière disette, être mêlée avec de la farine pour
           les  pauvres  gens  pour  faire  du  pain,  ce  qui  en
           grossirait le volume, quoique en diminuant la qualité.
           Il peut se faire que ce serait une ressource en pareil
           cas,  comme  la  racine  de  fougère,  ce  qui  ne  peut
           arriver que dans un temps d’une famine cruelle.”




        Etudes Locales, 3   année, nº 23, Juillet 1922, pp. 225-226
                           e



















                                                           © CatillusCarol.Corp
   179   180   181   182   183   184   185   186   187   188   189